Une entreprise ou une marque est en constante évolution. Dans l’imaginaire populaire, une marque conserve la même identité visuelle depuis sa création jusqu’à la fin.
Dans la réalité, ce n’est pas (plus) le cas. L’évolution du marché, des attentes de la clientèle cible, le repositionnement de l’entreprise, le changement de tarification… il y a tant de raisons pour lesquelles un rebranding est nécessaire au cours de la vie d’une entreprise.
Opter pour une refonte de son identité visuelle n’est ni un échec ni un signe que la précédente était mauvaise : il s’agit d’une évolution naturelle qui permet de conserver une cohérence entre la stratégie de marque et l’image de marque qu’elle reflète. ✨
J’ai travaillé avec Camille, Thomas et Joceline en 2021 sur la refonte de leur identité visuelle. Les Plantes de Tomine est une marque de produits riches en CBD et une exploitation agricole familiale en agriculture biologique. 2 ans après, j’ai posé quelques questions à Camille pour nous faire leur retour d’expérience sur le rebranding. 🤗
Dans cet article, c’est Camille des Plantes de Tomine qui est au clavier. ⌨️ Elle te partage les étapes traversées entre leur première identité visuelle et aujourd’hui, leurs attentes, l’impact de la refonte sur leur entreprise et te livre quelques conseils si tu te retrouves dans la même situation :
Créer son identité visuelle au lancement de sa marque
Nous avons travaillé à la création de notre entreprise en même temps que sur la création de notre identité visuelle, c’est-à-dire fin 2020 / début 2021. Nous étions donc aux prémices du projet, et nous travaillions à partir une feuille blanche. C’était tout nouveau pour nous !
On savait que 2021 allait être l’année de « l’explosion » de la culture du chanvre à actifs en France, que nous allions arriver nombreux à vendre nos récoltes à l’automne suivant, et donc qu’il serait nécessaire de nous démarquer, d’essayer d’être « identifiable ». C’est pour cette raison que nous avons rapidement voulu travailler sur notre identité visuelle.
Au départ, nos attentes étaient d’avoir une identité visuelle attractive, nous aidant à parler d’un sujet qui était parfois encore diabolisé : celui du CBD.
Nous souhaitions faire preuve de pédagogie, de transparence et d’accompagnement.
Notre idée de départ, c’était de démystifier le chanvre à actifs : « regardez, on peut le cultiver, on peut faire des produits bons et sains, on peut faire les choses bien, juste ici en France, sans traverser les frontières… Et donc regardez, on peut utiliser une feuille de chanvre dans notre logo sans être des trafiquants ! ».
Nous souhaitions nous démarquer par rapport à de nombreuses autres marques de CBD, à l’univers parfois un peu sombre, « bling-bling » ou suivant les codes de la canna-culture (fumée, feuilles, rouge/vert/noir/jaune, Bob Marley, etc). Ce n’était absolument pas nous, ni notre projet et on voulait radicalement trancher par rapport à cela, avec un univers doux, sensible, féminin aussi un peu (parmi les 3 personnes à l’origine du projet, nous sommes tout de même 2 femmes). Et sur la forme, nous avions besoin d’une identité complète que l’on puisse utiliser partout : sur notre site internet, sur nos réseaux sociaux, sur nos produits, sur nos publicités, sur nos impressions, etc.
Cependant, dès le départ, il y a eu quelques blocages…
Les signes qui reflètent un problème de direction stratégique
Nous avons rencontré plusieurs blocages dès les premiers mois à l’utilisation de notre identité visuelle.
Le premier concerne la forme. Je ne parvenais pas à utiliser et manipuler l’identité visuelle que nous avions. Les couleurs ne fonctionnaient pas ensemble, les typographies étaient trop neutres, le logo trop fin pour être bien visible et reconnaissable. Donc déjà à ce moment, je me suis dit « zut alors, pourquoi on a validé si vite… ça va être compliqué« .
Ensuite, j’avais l’impression qu’il me manquait un cadre. J’étais un peu perdue.
J’avais besoin de choses auxquelles on ne pense pas forcément lors d’une conception d’identité visuelle : des trames de composition, des illustrations, des formes, des visuels ou tout autre élément qui me serve de guide. Je n’avais pas ma boîte à outils complète, et les quelques-uns que j’avais, je n’arrivais pas à les utiliser.
Le second blocage, que j’ai mis plus de temps à objectiver, à formuler, c’était tout simplement que l’identité visuelle n’était pas celle des Plantes de Tomine : elle était trop fine, trop élégante, trop chic et haut de gamme.
Non pas que nous fassions du bas de gamme, nous ne voulions pas nous décrire avec ces termes. Nous souhaitons plutôt transmettre une approche artisanale, ou pour le coup agricole, douce, faite maison, simple mais travaillée et professionnelle. C’est à ce moment-là que j’ai senti que quelque chose ne fonctionnait pas. Mais ma foi je me suis dit « ce n’est pas grave, je vais la reprendre, la compléter moi-même« .
Et à ce moment, je tombe sur Lucie, et notamment sur le modèle de charte graphique à personnaliser qu’elle proposait à l’époque.
C’est parti, je tente, j’insère les éléments dont je dispose et j’en ajoute d’autres car ce premier branding était loin d’être complet. C’est notamment à ce moment que les gravures de plantes font leur entrée. Mais quand je vois le moodboard final, avec les couleurs, les typos, l’ensemble : quelque chose ne va pas, ça ne matche pas. 😫 On remarque que ce n’est pas un travail de pro, que c’est un peu bricolé. Et non, je ne veux pas renvoyer cette image.
J’envoie donc à Lucie ce travail, en sollicitant son regard professionnel de graphiste sur la question : « dis-moi Lucie, quelque que chose ne va hein ? Peux-tu m’aider et me dire quoi ? » Bon et bien pas loupé hein… ça n’allait pas ! 😅
Notre identité visuelle ne transmettait pas les valeurs qui nous sont chères, et était incomplète, ce qui avait déjà commencé à nous poser problème.
Prendre la décision de faire un rebranding : définir ses objectifs et choisir le bon moment
Suite à cela, nous nous sommes dit qu’il valait mieux reprendre notre identité visuelle pour régler ces blocages, et tout simplement être à l’aise avec, nous et nos clients. Car jusqu’ici, je ne me voyais pas communiquer avec notre identité visuelle en l’état, et je n’y arrivais pas.
Nous avons travaillé sur la refonte de l’identité visuelle avec Lucie de mai à juillet 2021, me semble-t-il.
L’entreprise a été créée officiellement en février, mais nous avons d’abord cultivé nos plantes, puis seulement à partir d’octobre environ, nous avons commencé à vendre nos produits et à communiquer, et avons ouvert notre site en novembre.
C’était très tôt dans le développement de l’entreprise, mais on ne voulait pas le faire plus tard, pour avoir un vrai lancement de nos produits et de notre communication avec cette nouvelle identité visuelle.
Pour le coup, je pense que peu de monde a vu la première version, et que personne ne s’en souvient aujourd’hui ! Nous n’avons donc pas eu à habituer nos clients à cette nouveauté, tout simplement parce que nous n’avions pas encore de produits à vendre, donc pas de client ! C’est un des avantages d’avoir pris la décision d’effectuer un rebranding aussi tôt.
Comment éviter un rebranding précoce ?
Avec du recul, nous aurions dû aller moins vite.
Déjà tout bêtement prendre le temps d’échanger avec plusieurs graphistes pour voir avec qui on se sentait le plus à l’aise. Le premier avec qui nous avions travaillé était certes très talentueux et professionnel, mais à moins réussi à écouter, comprendre et traduire notre besoin.
Ensuite, plutôt que chercher à nous faire plaisir, nous aurions du plus nous mettre dans la peau de nos clients.
Comprendre quelle image nous voulions leur transmettre, et quelles étaient leurs attentes. Enfin, je me demande souvent si notre identité serait celle que nous avons aujourd’hui si nous avions commencé notre branding avec Lucie dès le départ. Je ne le saurais jamais… 😉 mais ce n’est pas grave car nous sommes aujourd’hui pleinement alignés avec celle que nous avons.
L’impact d’un rebranding dans une entreprise : vers une identité visuelle alignée et durable
Suite au rebranding, ça a été le jour et la nuit en ce qui me concerne.
Tout d’abord, car j’ai eu encore plus d’outils que je n’en rêvais !!! 🤩 Les fameux templates (modèles), prêts à utiliser, à personnaliser. Aujourd’hui encore, c’est-à-dire deux ans après, bien qu’ils vivent et évoluent, je retourne voir ces templates avant certaines préparations de visuels pour retrouver les bonnes compositions ou associations de couleurs.
Je me suis également sentie plus légitime, plus pro, et cela nous a permis de créer nous-mêmes nos étiquettes et packaging.
Aux yeux de nos clients, je pense que là aussi, cela nous donne une certaine légitimité, on est pris aux sérieux. Je pense également que cela rassure sur notre entreprise et participe à la confiance que le client nous accorde : d’Instagram à l’étiquette d’un produit, en passant par notre site internet et aux goodies du colis, tout suit cette même charte.
C’est propre, constant mais vivant à la fois.
Autre point très important, comme je disais plus haut, nous voulions qu’elle soit identifiable. Aujourd’hui, je suis persuadé qu’elle est identifiée !
Par exemple, lors de nouvelles déclinaisons de produits (infusions ou fleurs brutes par exemple), comme nous en avons plus (7 et 9 respectivement) que de couleurs de la charte (5), nous ajoutons de nouvelles couleurs et nos clients le remarquent « tiens, c’est une nouvelle couleur, c’est une nouveauté ? » ! 🤗 Ce qui m’impressionne également, c’est qu’après 2 ans d’utilisation, je trouve cette identité toujours juste. Le projet évolue mais elle s’adapte.
Fun fact : elle est Christmas friendly ! Quand il a fallu cet hiver travailler sur du promotionnel pour les fêtes, j’ai utilisé le vert sapin, et le rouge de la charge, et on avait vraiment cet univers de fête, sans sortir de la charte ! Je n’ai pas envie de la faire évoluer aujourd’hui, mais je reste attentive et n’hésiterais pas à le faire quand cela deviendra nécessaire, j’espère simplement réussir à m’en rendre compte ! 😊
L’importance de l’identité visuelle pour une marque : les conseils de Camille
Un branding, c’est un outil puissant !! Qui peut apporter tellement, mais peut aussi faire beaucoup de dégâts s’il ne représente pas correctement l’entreprise et ses valeurs.
Le conseil que je pourrais donner à une entreprise qui ne se sent pas en accord avec l’image qu’elle transmet, c’est d’abord d’en prendre conscience et d’en discuter avec un·e graphiste qui saura voir et proposer, objectivement, des corrections possibles. Offrir son recul et son regard professionnel sur ce qui fonctionne ou non.
Dans mon cas, nous avions la tête dans le guidon.
On savait que quelque chose n’allait pas, mais on se disait que ce n’était pas grave… Si c’est grave ! Mais tout seul ce n’est pas possible d’y arriver. D’une part car le graphisme requiert de vraies compétences, des règles (compositions, contrastes etc), et aussi car seul, on ne se pose pas forcément les bonnes questions, on oubliera vite certains aspects : le regard du client, les valeurs au fondement du projet, celles que l’on veut transmettre, la mission que l’on se fixe etc… On ne peut pas être partout 😉. On prend souvent l’exemple d’une devanture de magasin : si on ne comprend pas ce que l’on va trouver dans la boutique, ou que cela semble un peu brouillon, on passe notre chemin. Aujourd’hui, on le fait en quelques secondes sur un écran depuis notre canapé.
Enfin, je pense qu’il n’y a jamais de « bon moment » pour un rebranding.
Quand on commence à ne plus être en phase, il faut le faire, sans attendre, quelle que soit la période de l’année, l’ancienneté ou la jeunesse de l’entreprise. Pour nous, c’était au bout de 4-5 mois seulement, donc c’est vrai, on n’avait pas prévu de remettre de l’argent dedans, ni de reprendre du temps, mais ça a été une de nos meilleures décisions de lancement finalement !
Comment savoir s’il faut faire un rebranding de ton identité visuelle ?
Pour résumer, voici les signes qui permettent d’identifier un besoin de rebranding pour une entreprise :
- Tu as de la difficulté à utiliser ton identité visuelle
- Tu ne te sens pas en phase avec ta communication
- Tu manques d’éléments pour communiquer
- Tu as du mal à justifier tes prix
- Tu as du mal à toucher ton public cible
- Ton identité visuelle n’est pas attractive
À noter : un rebranding ne nécessite pas forcément de tout jeter et de tout mettre de côté. Parfois, une évolution de l’existant est suffisante ! C’est d’ailleurs ce que beaucoup d’entreprises font, voir exemples dans cet article. C’est une étape qui peut se faire à tout moment de la croissance, que ce soit au début, comme les Plantes de Tomine, ou en cours d’activité.
Photographies © Ceriz a du Reflex
